Tribune du Prof Jean-Denis LIKWANDJANDJA
Les Taximotards dans la Province de la Tshopo font à présent face à un partenariat public-privé indigeste, suite auquel ils sont soumis à des contraintes qui contrastent gravement avec les textes en vigueur en République Démocratique du Congo.
Contrairement à tout entendement, une Association dénommée Agence Nationale , des Motards du Congo (ANMC/ASBL), récemment installée à Kisangani, fonctionne au régime d’un service étatique au détriment des Taximotards qui se trouvent curieusement contraints d’y adhérer et de payer des frais hors lois, dépassant de loin ce dont ils doivent effectivement et légalement s’acquitter auprès de la DGRPT.
Comme cela est connu de tous, 80 % des Taximotards ne sont pas propriétaires des motos qu’ils utilisent. Pour faire face au manque d’emplois permanent, ces derniers sont obligés de signer des contrats de vente des motos avec leurs patrons dont la créance revient actuellement à 5.000.000 FC à verser régulièrement par tranche. À la DGRPT, ils doivent payer un montant de 63 $ dont 35 $ pour la plaque, 17 $ pour la vignette, 10 $ pour le permis de conduire et 1$ de timbre.
En partenariat avec la Division provinciale des transports, représentant techniquement le Gouvernement provincial à cette instance, la fameuse association ANMC se substitue irrégulièrement en une plateforme exigeant l’adhésion des différentes corporations des Taximotards et mettant en place des mécanismes coercitifs d’organisation collective et de collecte des frais divers.
En effet, l’ANMC/ASBL exige 1000 FC par jour par Taximotard (sous peine des amendes promises en cas de non paiement), soit un montant de 365.000 FC par an, équivalant à 158,70 $ contre 63 $ des frais légaux à payer à la DGRPT. À ce montant quasiment triplé, il faut ajouter obligatoirement 15.000 FC pour le gilet et 13.000 FC pour la carte de membre.
Pourtant, le Taximotard est libre d’appartenir à une quelconque association de son choix, en vertu de l’article 37 de la Constitution de la République du 18 février 2006, telle que modifiée à ce jour, qui garantit la liberté d’association. Encore qu’il faille signifier qu’en RDC les associations sont régies par la Loi n’004/2001 du 20 juillet 2001 portant Dispositions générales applicables aux ASBL et Établissements d’utilité publique.
Mécontents de cette dictature associative certifiée par les services techniques de l’État, les Taximotards ont dû marcher et déposer, le samedi 27 mai courant, un Mémorandum à l’Assemblée Provinciale de la Tshopo pour réclamer justice et protection et protester contre le fonctionnement irrégulier de l’association ANMC.
Comment peut-on comprendre que sur l’affiche dite d’identification de Motocycliste l’on ait en en-tête l’identifiant de la Division provinciale des transports et, en bas de page, le site web de cette association ? N’est-ce pas là du désordre administratif ?
Nul n’ignore que les Taximotards constituent une couche sensible de la population et méritent d’être traités avec beaucoup de considération. Le taximoto est une alternative d’emploi grâce à laquelle beaucoup de ménages survivent face à la déconfiture sociopolitique que connaît le pays. Pourquoi doivent-ils être victimes des arrangements insidieux et mercantiles.
Mieux vaut prévenir que guérir ! La Tshopo ne mérite plus des sorts à la manière de ceux qu’elle vient à peine de connaître à la suite des conflits intercommunautaires générés par des partenariats inconfortables.
Professeur Jean-Denis LIKWANDJANDJA, Directeur du Centre de recherche, de prévention et de gestion des désastres sociaux et naturels (ACSES).