Les agressions répétées du Rwanda dans l’est de la RD Congo ont mobilisé la conscience mondiale contre les tentatives d’annexion des zones minières exploitées par les milices de pillages à la solde de Kigali sur fond de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
La Belgique a joué un rôle diplomatique primordial dans la dénonciation de ces crimes commis par le régime de Paul Kagame afin d’obtenir des sanctions de l’Union européenne et de la communauté internationale contre le Rwanda. Le philosophe Léon ENGULU III invite le gouvernement congolais à entamer une réflexion approfondie pour une coopération spéciale et pérenne avec la Belgique, dans l’esprit de la communauté belgo-congolaise proposée dans les années 1950 par Auguste Buisseret, ancien ministre belge des Colonies.
L’agression de trop
Face à l’agression de trop, perpétrée par l’armée rwandaise en territoire congolais pour s’assurer le contrôle des territoires investis par ses milices de pillage M23/AFC, la conscience mondiale s’est réveillée pour mettre un terme définitif à l’abominable guerre imposée à la RD Congo par le président rwandais Paul Kagame. La Belgique s’est particulièrement illustrée dans la mobilisation internationale pour le retrait définitif de l’armée rwandaise. Cette mobilisation sans pareille vise également la renonciation du président Paul Kagame à velléités d’annexion des zones minières convoitées par son régime depuis 30 ans en territoire congolais. La politique expansionniste de Paul Kagame menée en violation du droit international depuis des décennies a causé plus de 6 millions de morts, près de 2 millions de déplacés, 1 million de réfugiés et 20 millions de personnes en détresse humanitaire et alimentaire dans les zones agressées.
Le tollé mondial provoqué par les convoitises minières de Paul Kagame a conduit plusieurs pays à suspendre leur coopération avec le Rwanda et à prendre des sanctions contre ses dirigeants. En février 2025 le parlement européen a voté des sanctions contre le Rwanda et les USA ont sanctionné des responsables gouvernementaux rwandais et des responsables de ses milices de pillage AFC et M23. En mars 2025 la Commission européenne a lourdement sanctionné des responsables militaires rwandais et des entreprises appartenant aux proches de Paul Kagame. Le Canada, l’Allemagne, l’Angleterre ont suspendu leur coopération avec le régime de Paul Kagame. Le parlement du Luxembourg a voté à l’unanimité une motion demandant le retrait des troupes rwandaises du territoire congolais en apportant son soutien aux sanctions européennes.
A la suite du soutien particulièrement intense de la Belgique en faveur du respect de l’intégrité de la RD Congo et en faveur de ses populations gravement affectée par des exactions mortifères dans les zones occupées, le Rwanda a annoncé la rupture de ses relations diplomatiques avec l’ancienne puissance coloniale. Le Canada, l’Allemagne et le Luxembourg ont également suspendu et revu les termes de leur coopération avec le Rwanda, désormais au ban des nations.
Les plaidoyers des élus et mandataires belges
Le rôle prépondérant des élus et mandataires belges pour le réveil de la conscience mondiale face à la tragédie qui frappe la RD Congo depuis 30 ans a profondément ému les congolais. Les élus belges, députés européens, nationaux et échevins, Raoul Hedebouw, Marc Botenga, Pierre Kompany, Nicole Bomele, Bertin Mampaka, Gladys Kazady, Lydia Mutyebele, Dorah Ilunga, Jacob Kamuanga, Denis Liselele, auxquels s’est associé le député belge d’origine guinéenne Elhadj Moussa Diallo, et d’autres, se sont particulièrement illustrés à travers de vigoureuses campagnes de plaidoyers humanistes pour le retour de la paix en RD Congo, l’adoption de sanctions contre le Rwanda, et le retrait sans conditions de son armée et de ses milices de pillages du territoire congolais.
Maxime Prévot, ministre belge des affaires étrangères, des affaires européennes et de la coopération au développement, ancien président des Engagés et ancien bourgmestre de Namur, a assuré la coordination européenne des plaidoyers en faveur de la RD Congo, en rappelant les profonds liens d’amitié et de solidarité entre les deux pays, et en dénonçant vigoureusement l’agression rwandaise. Les congolais saluent également les plaidoyers vibrants du député européen français Thierry Mariani, qui a mobilisé le parlement européen pour un retour à la paix en RD Congo et l’application de sanctions fermes contre les responsables des crimes commis contre le peuple congolais durant les différentes agressions rwandaises.
L’esprit et l’action belgo-congolaise de Buisseret
La Belgique vient de jouer un rôle majeur pour la sauvegarde de la souveraineté et de l’intégrité de la RD Congo, le respect du droit international et du droit humanitaire dans un pays ravagé par les affres d’une guerre d’agressions répétées sans précédent en Afrique. Cette action déterminante appelle une profonde réflexion sur l’avenir des relations belgo-congolaises, dans l’esprit de la communauté des cœurs et des esprits entre les deux pays, annoncée dans les années 1950 par Auguste Buisseret, ancien ministre belge des Colonies.
Philosophe et juriste, libéral, Auguste Buisseret fut un grand avocat des personnes persécutées sous le régime nazi durant l’occupation allemande de la Belgique. Sénateur, ministre de l’instruction publique, il participa à la fondation de l’UNESCO. Ministre de l’intérieur, il contribua à la fondation du conseil d’Etat belge, aux Travaux publics il procéda à l’agrandissement des ports d’Anvers, d’Ostende et de Liège. En 1954 il devint ministre des Colonies, fonction durant laquelle il créa le réseau des écoles laïques et fonda l’Université de Lubumbashi, alors Elisabethville. C’est à Auguste Buisseret que le Congo doit l’organisation, en 1957, des premières élections communales auxquelles participaient, ensemble, congolais et belges, et cet esprit doit renaitre.
La communauté belgo-congolaise préfigurée par Auguste Buisseret voulait établir une relation partenariale et égalitaire entre la Belgique et le Congo, dans le cadre d’une étroite association, au sein de laquelle les peuples belges et congolais pourraient coopérer étroitement.
L’impulsion belgo-congolaise de Félix Tshisekedi
Dès son élection à la présidence de la RD Congo, le président Félix Tshisekedi a pris en 2019 d’importantes mesures permettant aux belges d’origine congolaise de voyager sans visas vers le pays de leurs ancêtres et d’y circuler librement. Cette avancée majeure dans les relations entre les deux pays a été unanimement saluée par les congolais, mais aussi par les parents belges de congolais. Cette décision fut un pas historique vers la consolidation d’une communauté fraternelle entre les deux pays. Les centaines de milliers de descendants belgo-congolais ont vocation à participer pleinement et activement, grâce à une révision urgente de la loi sur la nationalité, à la poursuite de la construction des destins communs de la Belgique et de la RD Congo.
Dans la dynamique du profond rapprochement qu’il a initié entre la Belgique et le Congo, le président Félix Tshisekedi, imprégné des différentes cultures belges depuis sa jeunesse, est appelé, par les congolais et par les belges, à matérialiser l’existence d’une communauté belgo-congolaise, qui permettra aux deux pays de poursuivre dans le même estprit leur destinée commune.
Pour un Comité belgo-congolais
La nouvelle impulsion du Président Félix Tshisekedi pour l’établissement d’une coopération fraternelle entre la Belgique et la RD Congo, et le soutien sans faille apporté par la Belgique à la sauvegarde de l’intégrité et de la souveraineté de son ancienne colonie, agressée depuis 30 ans par le Rwanda, appellent une profonde réflexion. Les congolais, réclament, à l’unanimité, la création urgente d’un Comité belgo-congolais pour fixer les termes de la communauté des cœurs et des esprits qui permettra aux deux pays de consolider de manière pérenne leurs relations culturelles, économiques, sociales, environnementales et sécuritaires. Parmi les questions prioritaires, ce cadre de concertation examinera particulièrement le principe d’accorder aux aux belges, sans distinction, un accès à la propriété foncière dans les mêmes conditions que les congolais. La dimension coopérative de cette mesure permettra de mobiliser et de sécuriser d’importants investissements en RD Congo, dont le droit foncier est considéré comme inadapté à la sécurisation des investissements.
Parallèlement à cette mesure prioritaire, le Comité belgo-congolais pourra préparer d’importantes mesures de nature à rétablir une coopération spéciale entre les deux pays dans un monde multipolaire. Le rôle central de la Belgique dans l’Union Européenne, géographique, économique et diplomatique, permettra de définir de manière concertée des mécanismes de coopérations harmonisées et alignées sur les priorités de développement de la RD Congo. Les domaines d’expertise de la Belgique en RD Congo, notamment dans les secteurs géologiques et miniers, de l’agriculture et de l’élevage, du bâtiment et de la construction ou de la médecine tropicale, permettront d’attirer d’importants investissements, de créer des échanges de compétences et de générer des emplois dans les deux pays. Les aspects sécuritaires de cette coopération associative permettront la préparation indispensable d’une politique de défense commune des intérêts partagés par les deux pays.
Léon ENGULU III
est philosophe (major de l’ULBruxelles),
agrégé de communication, scénariste, cinéaste,
ingénieur agronome,
ancien Coordonnateur a.i du Mécanisme National de Suivi
chargé des réformes,
ancien conseiller politique au ministère des Affaires étrangères.