L’Assemblée nationale de la République démocratique du Congo a été le théâtre ce lundi 12 mai d’un moment fort en matière de législation environnementale et alimentaire. Le député national Sosthène Maombi Katsongo, élu de Lubero dans le Nord-Kivu, a présenté une proposition de loi-cadre sur la pêche et l’aquaculture, dans le but de renforcer l’autonomie alimentaire et de créer des opportunités économiques durables dans le pays.
« Permettez-moi, avant toute chose, de remercier le Bureau pour avoir programmé l’examen de mon initiative législative », a déclaré l’élu à l’ouverture de son intervention. Il a également salué « les collègues Députés qui, par leurs interventions, vont témoigner leur soutien à ma démarche ».
Cette initiative législative s’appuie sur l’article 123, point 14 de la Constitution, qui habilite le législateur à édicter les principes fondamentaux relatifs à l’agriculture, l’élevage, la pêche et l’aquaculture.
Un secteur stratégique encore mal encadré
Le député a souligné que « de nombreux atouts militent pour la mise sur pied d’une législation sur la pêche et l’aquaculture ». Parmi ceux-ci : l’existence d’un vaste réseau fluvial, des grands lacs et d’une façade maritime, la volonté des communautés locales à s’engager dans la chaîne de valeur, et la présence de projets soutenus par des partenaires internationaux comme la Banque mondiale, la BAD et la FAO.
En outre, le pays dispose d’institutions de recherche, d’une société civile engagée et d’un processus de décentralisation favorable à une gestion locale efficace du secteur. L’abondance d’eau douce et le potentiel d’infrastructures favorisent aussi bien la pêche que l’aquaculture.
La transformation des algues, la qualité de l’eau douce et les engagements internationaux ratifiés par la RDC sont également des éléments moteurs dans ce plaidoyer pour une réforme législative attendue depuis des décennies.
Une législation obsolète et un vide juridique à combler
Le député Maombi a rappelé que le secteur est actuellement régi par un décret royal datant de 1937. « 88 ans après, les dispositions de ce Décret sont devenues obsolètes », a-t-il dénoncé. Quant à l’aquaculture, « elle n’est régie par aucun texte soit-il législatif ou réglementaire ».
Il estime qu’« il est donc utile que nous saisissions l’opportunité que nous offre cette proposition de loi pour moderniser nos instruments juridiques ». La loi-cadre proposée vise à fixer des principes fondamentaux favorisant un développement durable, en cohérence avec les engagements internationaux de la RDC.
« La loi que je propose va doter le pays de règles juridiques adéquates pour un développement durable du secteur », a souligné Maombi Katsongo.
Une réponse aux défis de 2050 et à la pression démographique
En soutien à cette proposition, un rapport présenté à l’Assemblée nationale alerte sur les défis mondiaux à venir. D’ici 2050, la population mondiale atteindra environ 9 milliards, ce qui pourrait entraîner une surexploitation dramatique des ressources halieutiques.
« Cette forte demande risque de provoquer une surexploitation des stocks de poissons et la disparition continue de certaines espèces aquatiques », prévient le rapport. La pêche durable devient donc un impératif, pour garantir la survie des générations futures.
Les scientifiques insistent sur la valeur nutritionnelle du poisson, source importante d’oméga-3, essentiels pour le cerveau, le système nerveux et la vue. Avec une consommation annuelle recommandée de 20 à 25 kg de poisson par habitant, la RDC forte de 100 millions de citoyens devrait produire plus d’un milliard de kilos de poisson chaque année.
Une révolution bleue pour l’autosuffisance alimentaire
Dans ce contexte, le député Maombi appelle à une « révolution bleue » : une transformation profonde du secteur de la pêche et de l’aquaculture, par une loi « moderne, consensuelle et fondatrice ». Il conclut : « L’œuvre humaine étant perfectible, le débat qui va bientôt s’ouvrir ici en plénière et en Commission constitue à mes yeux l’opportunité rêvée pour l’enrichissement qualitatif de la proposition de loi ».
La RDC semble désormais prête à franchir un cap décisif pour garantir la sécurité alimentaire, préserver sa biodiversité aquatique et promouvoir une économie bleue durable.
Baromètre.cd