Le retrait du Rwanda de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), officialisé lors du sommet de Malabo le 7 juin, ne passe pas inaperçu. À Kinshasa, cette décision est perçue comme un désaveu des mécanismes régionaux de paix, dans un contexte déjà marqué par de fortes tensions entre le Rwanda et la République démocratique du Congo.
Le gouvernement congolais a réagi dès le lendemain dans un communiqué cinglant, dénonçant une « stratégie d’évitement » de Kigali face aux exigences de redevabilité. Pour Kinshasa, le retrait rwandais ne relève pas d’un simple choix souverain, mais d’un « schéma récurrent » : celui de se soustraire aux obligations dès que les mécanismes collectifs imposent des responsabilités. « Une tendance inquiétante à se retirer d’un traité ou bloquer un processus dès qu’une exigence de redevabilité est évoquée », fustige le communiqué.
Cette décision intervient alors que les relations entre les deux pays sont fragilisées par des affrontements persistants dans l’est de la RDC. Kinshasa accuse régulièrement Kigali de soutenir des groupes armés dans cette région instable. Le départ du Rwanda de la CEEAC est donc interprété comme une menace directe pour la stabilité régionale. « Cette posture, tolérée trop longtemps, a conduit à des accords sans redevabilité, donc sans durabilité », déplore le gouvernement congolais.
Sur le plan juridique, Kinshasa rappelle que ce retrait va à l’encontre de l’article 34 du traité révisé de la CEEAC, qui interdit explicitement le recours à la force entre États membres. La RDC invoque également la Résolution 2773 du Conseil de sécurité de l’ONU, appelant au retrait des troupes rwandaises de son territoire. À travers ces références, le Congo entend souligner une « transgression claire des engagements pris au sein de la communauté régionale ».
Si le climat est tendu, Kinshasa affirme rester engagé dans les initiatives diplomatiques pilotées notamment par l’Union africaine, le Qatar et les États-Unis. Mais elle prévient que ces efforts ne doivent pas être synonymes d’impunité : « Participer à un processus de paix ne saurait signifier effacement du passé ni immunité pour des crimes graves ». En guise de réponse, la CEEAC a reporté la présidence tournante qui devait revenir au Rwanda, prolongeant celle de la Guinée équatoriale, preuve du malaise suscité par cette décision unilatérale.
CB