Tribune de Yamaina Mandala
Depuis que les rebelles du M23 ont repris les attaques, avec l’appui logistique du Rwanda, contre les territoires du Nord-Kivu, des voix s’élèvent de plus en plus demandant au gouvernement de retirer la RDC de l’East African Community, et de l’Organisation internationale de la Francophonie. La voix la plus écoutée est celle des évêques catholiques congolais.
Il sied de rappeler que c’est le 11 juillet 2022 que Christophe Lutundula, ministre congolais des Affaires étrangères, avait déposé à Arusha, en Tanzanie, siège de l’organisation, les instruments de ratification de l’adhésion du traité instituant la Communauté.
Mais, nul n’ignore que l’Ouganda et le Rwanda ont toujours cherché à manipuler les leviers du pouvoir en RDC pour mieux contrôler nos richesses. Pour cette raison, l’on comprend pourquoi les deux pays s’étaient vite félicités de l’arrivée du géant francophone. Au-delà de ses vastes richesses en ressources minérales et autres, du poids de sa population, la RDC offre, selon les experts, un marché d’environ 80 millions des consommateurs. Sans oublier sa position géographique très stratégique. Avec la libre circulation des biens et des personnes, les pays de l’Afrique de l’Est pourront facilement accéder à l’Ouest et à l’Océan Atlantique en passant par la RDC.
Créée dans sa forme actuelle dans les années 2000, East African Community consacre la libre circulation des personnes avec la suppression de l’exigence d’un visa pour des courts séjours aux citoyens des Etats membres.
Cependant, que l’on ne s’y méprenne point: ce que la situation que nous vivons présentement avec le M23 résulte de la conception différente du monde entre anglophones et francophones. L’Ouganda et le Rwanda s’alignent tous derrière les Etats-Unis dans leur volonté de dominer le monde. Tandis que les Francophones, au-delà du français, veulent être les militants du multiculturalisme dans le monde pour lutter contre l’étouffement, par une langue unique, des diverses cultures qui font la richesse et la dignité de l’humanité.
De ce fait, nos intérêts ne pourraient être que divergents. L’on comprend pourquoi les rebelles du M23 font semblant de se retirer des territoires qu’ils avaient occupés, sans accepter de quitter réellement le territoire congolais. Si le Rwanda joue un jeu qui lui est habituel, l’Ouganda aussi cherche sa part dans ce conflit.
Nous ne devrions donc pas trop compter sur les soldats kenyans. Il en est de même des militaires sud-soudanais qui, pourtant, n’ont pas encore stabilisé la situation dans leur pays, et dont la présence sur le sol congolais ne devrait consister qu’à ouvrir l’œil sur l’or exploité dans le nord-est de la RDC.
La RDC a par contre tout intérêt à consolider sa position au sein de la Communauté des Etats économiques de l’Afrique centrale où ses hauts fonctionnaires, à l’instar de Lunda Bululu, ancien Premier ministre, ont joué un rôle clé. Tous les membres de la CEEAC disposent maintenant d’un passeport unique, leurs populations se déplacent ici et là sans visa, sauf la RDC.
Conclusion : notre appartenance à l’EAC ne risque que de nous apporter des ennuis, aussi longtemps que Museveni et Kagame seront au pouvoir. Le Rwanda tient à faire naître un Etat dit « des Grands lacs » dominé par des Tutsis qui lui permettrait d’exploiter sans vergogne les richesses du Nord et du Sud-Kivu pour son développement. Les autres pays membres de l’EAC le savent, y compris les commandants de la force régionale dominée par le Kenya. Pense-t-on vraiment qu’ils travaillent pour les intérêts de la RDC ? On en doute.
Alors, revenons à la CEEAC, notre milieu naturel, et quittons une communauté où l’on ne jouera pas franc jeu avec nous.
YAMAINA MANDALA