Ah, la République Démocratique du Congo, ce pays où même les taxes ont une âme d’artiste : elles apparaissent, disparaissent, se transforment, et surtout, elles ne meurent jamais. Aujourd’hui, intéressons-nous à une œuvre magistrale de la fiscalité nationale, un chef-d’œuvre d’ingéniosité bureaucratique : le GO Pass.
D’un côté, l’Inspection Générale des Finances (IGF), dans un élan de transparence (ou de distraction, on ne sait plus), nous apprend que nous continuons de payer ce péage aérien, maritime et terrestre à cause d’un contrat signé sous Joseph Kabila, et que cette saignée prendra fin en 2024. De l’autre, notre Première Ministre, pleine d’assurance, nous annonce que non, ce n’est pas encore fini : la saignée continue jusqu’en 2027. Trois années de plus. Un petit bonus, comme un supplément qu’on n’a jamais commandé, mais qu’on est forcé de payer.
Alors, qui ment ? Qui dit vrai ? Et si, dans ce grand bal de contradictions, les deux mentaient ? Après tout, la RDC est un pays où la vérité est une variable d’ajustement, où les chiffres sont des énigmes et où les promesses ont la durée de vie d’un feu de paille sous la pluie.
Imaginez un instant la scène : un Congolais lambda, valise en main, qui s’apprête à voyager. Il a économisé chaque centime pour son billet, mais au moment d’embarquer, une voix l’arrête : « Monsieur, le GO Pass ! » Ah oui, cette taxe dont on ne sait plus très bien à quoi elle sert, mais qu’il faut payer, encore et toujours, sous peine de rater son vol. Et là, il se demande : « Mais ce n’était pas censé s’arrêter en 2024 ? » Il a entendu l’IGF le dire. Mais il a aussi entendu la Première Ministre affirmer que c’était jusqu’en 2027. Qui croire ? À qui se fier ?
Il cherche la vérité du regard, mais elle n’est nulle part. Parce qu’au Congo, la vérité est un mirage. Elle danse devant nous, nous fait croire qu’on l’atteint, puis s’éloigne encore. Aujourd’hui, on nous parle de 2024, demain de 2027, et après-demain, peut-être qu’un autre expert, un autre ministre, viendra nous expliquer que le GO Pass continuera jusqu’en 2030, ou même indéfiniment, parce que, tenez-vous bien, “nous devons honorer les engagements du passé”.
Mais au fait, ces engagements, qui les a pris ? Qui a signé ces contrats éternels où seuls les Congolais paient, mais où personne ne sait où va l’argent ? Silence radio. Opacité totale. Pendant ce temps, les aéroports restent délabrés, les routes sont des parcours du combattant, et les ports ressemblent à des scènes de films post-apocalyptiques.
Nous, peuple congolais, nous sommes comme ces voyageurs pris en otage dans une gare sans train, forcés de payer un billet pour une destination inconnue. 2024, 2027, 2030… Les années passent, les gouvernements changent, mais les taxes, elles, restent et prospèrent.
Parce qu’ici, au Congo, les taxes ont plus de droits que les citoyens.
Le patriote
Philippe Mpunga