Alors que la République démocratique du Congo se rapproche des États-Unis pour l’exploitation conjointe de ses minerais stratégiques, la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO) appelle à la prudence et réclame des engagements fermes en faveur du développement des populations congolaises.
Lors d’un point de presse tenu le vendredi 16 mai à Kinshasa, Mgr Donatien Nshole, secrétaire général de la CENCO, a exprimé les inquiétudes des évêques catholiques quant aux accords annoncés autour des ressources naturelles. « Nous ne pouvons pas continuer à répéter les erreurs du passé. Il est temps que l’exploitation de nos richesses profite réellement à notre peuple », a-t-il affirmé.
Le partenariat évoqué concerne principalement les minerais dits « 3T » (étain, tungstène et tantale), très prisés dans l’industrie technologique. Des négociations sont en cours pour permettre à des entreprises américaines d’investir dans ce secteur, avec en contrepartie la promesse d’emplois, de transfert de compétences et d’infrastructures.
Début avril, le président Félix Tshisekedi avait accueilli à Kinshasa Massad Boulos, conseiller du président américain Donald Trump. Cette rencontre avait officialisé l’intérêt des États-Unis pour des investissements « de plusieurs milliards de dollars », selon les propos de Boulos, qui avait vanté une collaboration stratégique.
Cependant, la CENCO souligne l’absence de transparence autour de ces tractations et demande des garanties. « Les populations doivent être informées et associées. L’État doit protéger les intérêts nationaux avec rigueur », a insisté Mgr Nshole. Pour les évêques, tout partenariat qui ne tient pas compte de la justice sociale est voué à l’échec.
Ce positionnement trouve un écho auprès de plusieurs voix de l’opposition. Delly Sessanga, président du parti Envol, n’a pas mâché ses mots : « Ce partenariat ressemble à un troc sécuritaire, une fuite en avant du régime Tshisekedi après des années d’échecs en matière de gouvernance ».
Pour certains analystes, cette sortie de la CENCO traduit une méfiance généralisée face à des projets qui, historiquement, ont rarement bénéficié aux communautés locales. Les populations vivant dans les zones minières continuent de subir pauvreté, pollution et insécurité, malgré la richesse de leur sous-sol.
« Le développement intégral du Congolais ne doit plus rester un slogan », a martelé le secrétaire général de la CENCO. L’Église catholique exhorte le gouvernement à s’engager sur des clauses contraignantes, notamment en matière d’éducation, de santé et d’infrastructure.
La pression de la société civile et des institutions religieuses pourrait forcer les autorités à revoir leur copie, à quelques mois d’échéances politiques sensibles. Pour la CENCO, l’exploitation des ressources naturelles doit s’inscrire dans une vision à long terme, centrée sur l’humain.
En somme, alors que les appétits étrangers pour les minerais de la RDC se confirment, la CENCO veut rappeler que les véritables bénéficiaires de ces partenariats doivent être les Congolais eux-mêmes. Et sur ce point, les évêques semblent déterminés à ne plus se contenter de promesses.
CB